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RECYCLAGE HUILES VIDANGE
Le recyclage des huiles de vidange |
Le recyclage des huiles usagées est une vraie alternative éconologique à leur simple remplacement par un produit ayant suivi l'ensemble du cycle de production (extraction, transport, raffinage...).
Malheureusement, cette solution fait du tort aux poids lourds de la production et du traitement des huiles de vidange : Veolia et Total notamment... et un petit patron de Seine-Maritime, a des difficultés pour alimenter son usine de régénération d'huiles usagées.
Eco Huile
La raffinerie verte de Joël Picard à Lillebonne (en bord de Seine, ce qui ouvre des perspectives intéressantes de transport par voie d'eau), est reconnaissable avec sa tuyauterie multicolore et ses grandes cuves bleues. C'est la seule unité française actuellement, capable de régénêrer les huiles de vidange, grâce à un procédé propre qui régénêre 75 % des 115 000 tonnes qui lui étaient confiées chaque année.
En matière de recyclage, le fondateur d'Eco Huile sait de quoi il parle, puisqu'il a déjà à son actif un groupe spécialisé dans le recyclage du PVC, des plastiques et de l'aluminium (dont la fabrication est très gourmande en énergie).
De plus, le fonctionnement de son installation est plutôt clean puisque il ne produit aucune odeur à la sortie des tuyaux, et au final, l'huile recyclée n'a rien à envier à son homologue neuve, prête à être réintroduite dans les moteurs.
Pour mémoire, la plus grande partie des huiles usagées est aujourd'hui brûlée, tout comme les pneus d'ailleurs.
David gêne Goliath !
Mais Veolia Environnement et Total n'apprécie pas que l'on remette en circulation de l'huile qui n'est pas passée par leurs circuits mercantiles.
En effet, jusqu'à présent, la collecte d'huile de vidange était assurée en France à 50 % par Veolia, avec à la clé une subvention de 84 euros à la tonne - payée par le contribuable - alors qu'elle est fournie gratuitement par les garagistes.
Ensuite, l'incontournable mastodonte du traitement des déchets se chargeait de la valoriser, principalement comme combustible, ce qui laissait au total une confortable marge.
Quand à Total, un des principaux producteurs de produits hydrocarbures, il estime ce réemploi "noble" d'huile de vidange comme un manque à gagner préjudiciable à ses affaires...
Jusqu'à présent l'expérience, estimée comme marginale et non rentable, ne semblait pas les gêner ; mais la donne a changé aujourd'hui et ils considèrent le modèle comme suffisamment pérenne économiquement pour vouloir prendre le contrôle de toute la filière et supprimer la concurrence.
Nos deux poids lourds ont donc décidé de fermer le robinet d'approvisionnement en huiles usagées.
Veolia livrait 60 000 tonnes d'huiles usagées en 2006 à Eco-Huile, aujourd'hui, ce n'est plus que 12 000 tonnes.
Il ne s'agit donc ni plus ni moins que d'une asphyxie de la filière.
A qui profite le crime ?
Se prépare en effet l'ouverture d'une usine de recyclage d'huile "Osilub", filiale commune de Veolia et Total. Elle prévoit de s'installer, comme par hasard, à Gonfreville-l'Orcher à 12 kilomètres de celle d'Eco Huile.
Les moyens financiers ne manquent pas puisque l'unité principale coûtera 55 millions d'euros pour une capacité de traitement 120 000 tonnes d'huile usagée.
Pour une fois, un peu inspiré sur un maillage intelligent du territoire pour ce type d'installation, les pouvoirs publics préconisaient plutôt l'implantation de cette unité à Fos-sur-Mer, ce qui présentait l'intérêt de pouvoir prendre en charge la collecte du sud de la France, via la vallée du Rhône notamment ; mais les deux géants ont préféré venir parasiter le pionnier devenu concurrent que d'être un minimum raisonnables.
Ils représentent à eux deux un tel poids politico-économique qu'ils savent pouvoir faire ce qu'ils veulent ou presque en toute impunité.
Il n'est d'ailleurs pas inintéressant de savoir que le sénateur maire du Grand-Quevilly, Marc Massion, avait refusé fin 2007 de donner son permis de construire pour ce complexe en invoquant « de trop nombreux points d'incertitude liés à l'environnement et aux risques industriels pour la population ».
Osilub s'est alors rabattu sur la plus conciliante communauté de communes du Havre, dont dépend Gonfreville, pour installer son usine.
Quels produits sortiront de cette nouvelle unité ?
Comme si cela ne suffisait pas, on n'est pas sûr des produits finaux qui seront fabriqués :
- Veolia affirme que le distillat obtenu sera de l'huile.
- Eco-Huile est persuadé qu'il sera transformé en carburant.
Il n'en reste pas moins que le procédé industriel d'Osilub suscite des interrogations.
Se défendant comme un beau diable, Joël Picard espère faire capoter le projet de ses puissants concurrents en justice.
Il a attaqué l'arrêté préfectoral autorisant la mise en exploitation de l'usine.
Il souhaite également que l'installation sera classée Seveso, ce qui obligerait Veolia et Total à revoir leur copie et repousserait d'au moins 6 mois la mise en route de leur usine...
Espérons qu'il obtiendra gain de cause et qu'au final, il ne sera pas tout simplement racheté par Total et Veolia qui ne sont pas à une acquisition près...
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