Chaque année, il faut déplorer de nombreux accidents, allant quelquefois jusqu'au coulage des bateaux lors du passage des écluses.
Ce ne sont pas forcément les nèophytes qui se font prendre, mais plutôt ceux dont l'expérience acquise endort la vigilance.
Par ailleurs, pour les voileux, transitant entre mer et océan, c'est souvent une expérience nouvelle à laquelle ils ne sont pas forcément bien préparés.
Risques encourus
Pour les écluses
- risque de dégradation (portes, bajoyers...)
Pour les plaisanciers et leur embarcation
- indisponibilité des écluses endommagées, bloquant tout un tronçon de navigation,
- accident pouvant occasionner des séquelles au bateau ou à son équipage, avec quelquefois au bout avec un peu de malchance, le coulage et/ ou la mort.
Ce qu'il faut faire...
Dans tous les cas
- avoir toujours ses amarres claires, sans noeud, brisure partielle ni irrégularité importante,
- passer 2 haussières pour s'amarrer.
- veiller à ce que les points d'amarrage des bollards permettent de maintenir les mouvements autant vers l'avant que vers l'arrière (à ce sujet, savoir que les bollards sont rarement bien positionnés pour les bateaux de plaisance de taille intermédiaire...)
- si les bollards sont mal placés, utiliser un amarrage en triangle (haussières avant et arrières passées sur un bollard en position centrale du bateau.
- arrêter le moteur, à la fois par courtoisie pour ceux qui passent l'écluse avec vous (votre équipage et ceux sassant en votre compagnie), mais aussi pour ne pas polluer plus que nécessaire l'eau et l'air ambiants ; j'ajouterai qu'au prix du carburant et compte tenu de la durée d'une sassée, cela commence à se connaître financièrement.
A ceux qui argumentent qu'en laissant leur moteur en marche, ils épargnent leur démarreur, on pourrait rétorquer qu'ils usent prématurément leur alternateur... et leur moteur !
- beaucoup d'écluses "pissent" (fuient, abondament dans certains cas) ; il faut toujours veiller à ce que ce ne soit pas un risque de remplir le bateau ce qui s'est déjà produit à maintes reprises en laissant ouverts des passages qui n'ont pas à l'être ou en se positionnant mal.
- dans le cas de bollards flottants (ils montent ou descendent en même temps que le niveau d'eau de l'écluse), s'amarrer au milieu ou en triangle (comme expliqué plus haut).
En montant
C'est surtout dans ce sens que se concentrent la majorité des problèmes :
- lorsqu'on est la seule embarcation à écluser, il est préférable de rester proche des portes "aval", ce qui permet d'éviter le flux des vannes,
- écluser toujours avec 2 haussières de bonne longueur (les textes disent "au moins une fois la longueur du bateau", mais c'est en réalité quelquefois insuffisant).
- utiliser des cordages de diamètre adapté (spécifié lors de l'achat et en rapport avec le poids du bateau).
- raccourcir les cordages au fur et à mesure de la montée.
- l'ouverture de la vanne du côté où est amarré le bateau tend à coller celui-ci au bajoyer, l'autre à l'en éloigner (un bon éclusier ouvrira la première en priorité, mais il est intéressant de répèrer cet ordre d'ouverture sur un tronçon équipé d'écluses automatiques souvent réglées sur le même modèle...
En avalant
- lorsqu'on est la seule embarcation à sasser, il est préférable de rester proche des portes "amont", pour éviter l'aspiration des vannes,
- bien surveiller ses amarres, car il suffit qu'elles se coincent pour une raison quelconque et votre bateau se retrouve "pendu" (nous ne connaissons aucun navigateur en eaux intérieures à qui ce n'est jamais arrivé),
- avoir toujours un couteau tranchant à portée de main pour vous sortir de cette situation périlleuse en coupant le plus rapidement possible l'amarre coincée.
- le seuil de maçonnerie qui sert de butée aux portes amont est souvent au dessus du radier de l'écluse, et ceci quelquefois de plusieurs mètres ; si vous ne voulez pas que votre poupe (hélice, safran...) se retrouve posée sur lui à la fin de la descente, restez bien au delà des traits de peinture qui marquent sa limite lorsque l'eau descend. Pour simplifier, rester à distance des portes-amont, dans une écluse avalante.
Ce qu'il faut éviter...
Se maintenir au moteur
Il devient de plus en plus rare chez les professionnels de placer deux cordages dans les écluses. La jeune génération se maintient embrayé en marche avant, sans se préoccuper des bateaux qui entrent derrière, ni de la dégradation des bajoyers, pulsés par le puissant flux des hélices.
C'est une pratique dangereuse et interdite, mais qui est rarement rappelée à l'ordre par les éclusiers. Que dire alors lorsqu'il s'agit d'écluses automatisées.
Autres comportements dangereux
- n'installer qu'une seule amarre, car non seulement elle peut se rompre, mais elle ne contraindra les mouvements du bateau que dans un seul sens ; lorsque les vagues créées par le flux des vannes reviendront après avoir ricoché contre les portes opposées, plus rien ne vous maintiendra.
Pour ceux qui ne sont pas convaincus, "Uhuru", une péniche logement allemande de 16 mètres a coulé dans l'écluse n°20 de Thaon-les-Vosges (PK77) ; son ancre, qui s'était accrochée aux croisillons de la porte amont, a entraîné le bateau par le fond, ce 4 août 2012.
- amarrer le bateau par un noeud sur le taquet avant, marche avant embrayée et quitter le bateau par l'échelle pour aller aider l'éclusier à manœuvrer les portes.
- Lorsque vous êtes derrière un gros volume, ne pas lâcher les amarres tant que le bateau devant vous n'est pas sorti de l'écluse ; en effet les forts remous que sa remise en mouvement provoque, sont d'une puissance telle que vous ne pourrez rien maîtriser, même au moteur...
Du bon réglage des écluses automatiques...
Autant le passage de beaucoup d'écluses automatisées se fait sans souci, autant certaines sont reconnues unanimement par les plaisanciers comme étant mal agencées, mal réglées, voire dangereuses :
- vannes qui s'ouvrent trop rapidement ou du mauvais côté, projetant avec force l'embarcation du côté opposé à l'amarrage, plutôt sensé se réaliser vers la plateforme portant la potence de sassement.
- échelles mal placées ou inacessibles, idem pour les potences à tirettes.
- bollards mal placés ou trop loin du bajoyer (inacessibles du rouf des bateaux),
- barrières de protection trop proches des bajoyers empêchant tout déplacement en sécurité des équipages...
Comme trop souvent, les responsables de VNF équipent les ouvrages sans avoir pris l'avis et l'expérience des usagers ; c'est la démarche inverse des "cercles de qualité".
Et pour finir...
Le travail des éclusiers est quand même d'aider les plaisanciers pour le passage des écluses...
Combien vous regardent galérer à passer les haussières, sans bouger un doigt ?
Il serait temps qu'ils comprennent que prendre les amarres et les passer autour d'un bollard ne fait pas perdre de temps, bien au contraire car la manoeuvre ne peut commencer que lorsque le bateau est sécurisé...
Ce que dit le code
(Les règles d'utilisation des écluses)
Il existe différents types d'écluse : écluse automatique, écluse gardée, écluse devant être manoeuvrée par le plaisancier uniquement.
Les règles d'utilisation décrites ci-dessous sont valables pour tous les types d'écluse.
Entrée dans l'écluse
Si les portes de l'écluse sont fermées, le bateau doit être arrêté à une distance suffisante pour éviter les remous créés par le remplissage ou la vidange du sas.
A l'ouverture des portes, le plaisancier devra laisser sortir les bateaux présents dans l'écluse, et, de manière générale, il devra respecter les instructions données par l'éclusier. L'entrée dans l'écluse se fait à vitesse réduite, lorsque les portes sont totalement ouvertes, et que le signal éventuel a été donné (feu vert sur une écluse automatique).
Dans l'écluse
Une fois entré dans l'écluse, le plaisancier stationne son bateau à distance des portes, l'amarre à une bitte (et non à un autre bateau), et coupe le moteur. Attention à ne pas stationner sous la détection électronique des écluses automatisées.
En cas d'utilisation de l'écluse dans le sens de la descente, il convient de prévoir des longueurs de cordage suffisantes pour palier la descente du niveau d'eau.
Les manoeuvres
Le plaisancier est tenu d'assurer la surveillance des opérations pendant toute la durée des manoeuvres.
Après la fermeture de la porte, et l'ouverture des vannes, le niveau d'eau change dans le sas. Le plaisancier doit alors s'assurer de maintenir les amarres tendues :
- les navires avalants doivent laisser filer les amarres lors de l'abaissement du niveau d'eau ;
- les navires montants doivent tendre progressivement les amarres pour maintenir le bateau contre le bord de l'écluse.
La sortie
Lorsque les niveaux d'eau sont équilibrés, la porte peut être ouverte.
Les amarres ne doivent pas être lâchées avant la fin du cycle d'éclusage. Le plaisancier sort de l'écluse à vitesse réduite, en respectant l'ordre de sortie selon la place des bateaux dans le sas.
Les écluses en Bretagne
C'est la région Bretagne, et non VNF, qui gère ses voies naviguables et donc ses écluses.
Outre le fait que leur franchissement n'est pas soumis au règlement d'une vignette, les écluses bretonnes présentent quelques caractéristiques intéressantes :
- généralement le bajoyer d'amarrage est toujours le même et indiqué par cette pancarte.
- des amarres fixes pendantes sont proposées aux plaisanciers, ce qui évite d'utiliser celles du bateau et d'avoir à les accrocher.
Forum
Je viens de lire votre présentation des écluses bretonnes et je me pose une question : pourquoi les dispositifs mis en place là-bas, et qui découlent juste du bon sens et d'un meilleur service au plaisancier, ne sont pas généralisés sur le réseau géré par VNF sur lequel en plus nous payons une vignette au prix conséquent ?
P.P
Je précise votre analyse pertinente par la constatation que les problèmes aux écluses se concentrent sur deux périodes pour un plaisancier : lorsque vous débutez, par inexpérience, et dès que vous vous sentez trop sûr de vous, alors que votre vigilance est endormie ; c'est d'ailleurs le cas pour beaucoup de disciplines...
B.C
Dans le cadre d'une de mes affaires, je suis à la recherche de renseignements sur des dispositifs d'amortisseurs de choc dans les écluses pour protéger la porte aval.
Vous faites référence sur votre site internet : carnet-de-bord-grau-du-roi-chalon-sur-saone, à ce type de dispositif.
Avez-vous vu ce genre d'équipement sur d'autres écluses ?
P.P
Réponse
Oui, entre autre toutes les écluses de forte chute du Rhône sont équipées de ce système.
Le mieux serait donc de prendre contact avec la CNR (Compagnie Nationale Du Rhône) pour obtenir plus de détails techniques sur ce dispositif.
Bonjour,
J'ai lu avec attention cette page fort intéressante mais ne peut déterminer si les éclusiers doivent (et dans quels cas ?) prendre les amarres des bateaux.
Dans la réalité, très peu le font et si on leur en fait la réflexion, on nous donne des infos contradictoires : pour certains "cela fait partie de l'accueil à l'écluse pour les bateaux montants" alors que pour d'autres "ils n'ont pas à le faire"...
Pouvez-vous nous donner un texte ou une référence de note de service pour éclaircir la chose ?
G.J
réponse
L'article 6.28 du règlement général de police précise que "l’amarrage et la manœuvre des amarres sont de la responsabilité du pilote du bateau.
L’éclusier peut néanmoins, s’il le juge utile ou nécessaire, aider la manœuvre d’amarre des cordes autour du bollard (ou de la barre de fiche), notamment dans les cas suivants qui doivent rester limités :
- en cas de danger, pour aider à stabiliser au plus vite le bateau ;
- dans un rôle pédagogique, pour indiquer aux navigants la bonne pratique.
En cas de danger grave et imminent, l’éclusier peut, après avoir mis en sécurité l’écluse, être amené à manœuvrer l’amarre lui-même."
Votre réponse à G.J dit le règlement, mais le même règlement indique :
"A égalité de niveau entre les deux masses d'eau, manœuvrer afin d'ouvrir les vantaux. Le bateau peut sortir du sas.
Vous pouvez alors, désamarrez le bateau et avancer doucement jusqu'au ponton d'embarquement afin de récupérer votre équipier. Les membres d'équipage ne doivent pas utiliser les échelles de sécurité pour embarquer dans le bateau."
Mais lorsqu'il n'y a aucun ponton d'embarquement et de débarquement (ce qui arrive souvent), et qu'en plus, la berge n'est pas praticable, sauf à mettre en danger le débarquement et l'embarquement de l'équipier, comment faire ?
Idem, lorsqu'il n'y a aucun équipier ou qu'il s'agit d'enfants ?
René S.
Je confirme ce qu'écrit René S. En effet, cet été, mon équipière et moi nous sommes faits sermonnés par les éclusiers du Canal du Midi, parce que nous utilisions les échelles de bajoyer pour grimper amarrer notre bateau... Alors, qu'en est-il vraiment ?
B et J H.
Merci pour ce récapitulatif qui est très utile pour les nouveaux naviguants, car le passage des écluses en pratique ne fait pour l'instant pas partie des épreuves du permis fluvial, et c'est bien dommage.
J.B
Pour compléter ce que dit J.B, j'ajouterai que l'attitude de certains plaisanciers se disant chevronnés est lourde de responsabilité lorsqu'ils annoncent fièrement aux débutants qu'il n'est pas nécessaire de s'amarrer et qu'il suffit de maintenir le bateau au moteur.
H.G
Ancien marinier retraité, je partage vos conseils avec toutefois une réserve sur l'arrêt du moteur pendant l'éclusage. C'est perdre ses moyens en cas de panne de démarrage due à un problème électrique (mauvaise masse, relais collé, etc.) et dans une écluse à grand gabarit au moment de sortir au beau milieu des mastodontes qui vous entourent, ça fait désordre.
Il me reste qu'à vous féliciter pour l'ensemble de votre site très riche en infos.
Bien cordialement,
J.Claude V.
Je réagis à mon tour sur le fait d'arrêter son moteur pour écluser.
De ce que je connais, en Angleterre et en Allemagne c'est la règle ! Il n'y a pourtant ni plus de désordre dans la navigation, ni plus d'accident... Alors qu'attendons-nous ?
Un litre à 10 € et/ou qu'on nous impose un pot catalytique.
A. A
D'accord avec A. A., j'ajouterai que plusieurs copains à qui j'ai demandé pourquoi ils laissaient leur moteur en route pendant les sassements, m'ont déclaré que c'était pour préserver leur démarreur. Ils l'ont pourtant changé depuis alors que le mien tient toujours ainsi d'ailleurs que sur ma voiture... dont je stoppe le moteur pour un arrêt de 10 à 20 minutes !
Je précise quand même que lorsqu'on passe à plusieurs dans les écluses et que les conditions sont mauvaises ou limites, je garde bien entendu mon moteur en marche, au cas où...
P.H
Trés bon dossier sur le sujet. Les photos illustratives sont bien choisies et représentent bien la diversité des écluses que nous avons rencontrées lors de notre transfert de la Manche vers la Méditerranée. L'équipage et notre voilier auraient gagné à le lire auparavant, ce qui nous aurait évité du stress et quelques désagréments...
Guy et Annie.
Autres liens connexes
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