Tout plaisancier qui a un peu bourlingué sur nos canaux ou rivières - et même en mer - a forcément rencontré au gré de ses escales des plaisanciers atteints d’un handicap et qui naviguent pourtant exactement comme les autres.
Bien entendu, quelques loueurs ont commencé à équiper quelques embarcations de leur flotte avec des amènagements facilitant leur vie à bord, mais certains propriétaires touchés par le handicap y résident à l’année, en couple ou en famille.
Quelles sont les solutions adoptées ?
Des origines diverses...
Qu'il s'agisse d'un handicap remontant à la naissance, suite à une maladie invalidante ou à un accident, la personne touchée a potentiellement autant de chance de vouloir naviguer ou s'établir sur un bateau, qu'un valide.
Evidemment, il existe assez peu d'embarcation en occasion déjà adaptées à son problème particulier et la construction d'un modèle sur mesure est un vrai gouffre financier pas forcément à la portée de chaque personne à mobilité réduite.
Reste la solution de l'aménagement d'un bateau existant, mais il faudra y consentir un budget qui reste conséquent, comme nous allons le voir...
Des équipements à terre non adaptés
Les aménagements spécifiques à bord, à l'initiative des propriétaires, permettent forcément de naviguer et d'apponter dans de bonnes conditions ; mais dans la plupart des capitaineries et espaces sanitaires rien n'a été prévu pour les plaisanciers handicapés.
Le pire reste quelquefois dans l'accés à son bateau :
- passerelles, souvent trop étroites pour un fauteuil roulant et parfois trop courtes ce qui les transforment en "échelles de meunier" à marée basse.
- pontons en bois, ne permettant pas à des personnes appareillées avec une canne ou des béquilles, d'y circuler en toute sécurité ;
- catways trop étroits pour une personne à mobilité réduite.
Le mieux restant de s'amarrer à quai, si de la place est disponible et si celui-ci présente un dénivellé compatible avec le déploiement de la passerelle du bateau.
La réglementation
La loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour "l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées" a introduit l'obligation d'accessibilité généralisée à l'environnement pour le 1er janvier 2015 ; elle étend cette règlementation à toute la chaîne du déplacement.
Les ports de plaisance comme tous les établissements recevant du public doivent donc devenir accessibles aux personnes handicapées, quelque soit la nature de leur handicap, en mettant en conformité leurs infrastructures à cette date.
Pour information des gestionnaires de ports, il existe un guide édité par la Fédération française des ports de plaisance.
Quels aménagements spécifiques du bateau ?
Prenons l'exemple d'un plaisancier qui se trouverait dans l'obligation de se déplacer en fauteuil roulant, voici quelques modifications à prévoir dans l'aménagement de son bateau pour y vivre à l’année :
- des corridors d’au moins 80 cm de large, ce qui oblige à redistribuer l'agencement intérieur,
- l'agrandissement de la cuisine,
- une chambre à l'ouverture suffisament large équipée d'un lit réglable avec potence et d'un matelas anti escarres,
- la construction d’étagères à hauteur adaptée,
- l'installation d’escaliers dans les trappes de cales pour pouvoir y descendre en appui sur les bras,
- l'installation d'ascenseurs hydrauliques pour circuler entre les éventuels niveaux,
- l'installation d'au moins une rampe d’accès au quai,
- la modification des trappes moteur dans le but de les agrandir,
- l'ajout de roues au fauteuil de pilotage ou plateforme élévatrice, permettant un maniement aisé des commandes et une vision satisfaisante,
- l'aménagement d'une salle d'eau avec toilettes et douches, accessibles.
La flotte de location
Chez les trois grands loueurs de bateaux en eaux intérieures, seule (sauf erreur, au moment de la rédaction de cet article) la société "Les Canalous" a investi dans la transformation de deux de ses "Tarpon" pour offrir la possibilité de naviguer aux plaisanciers handicapés.
Il convient déjà de rendre hommage à cette pionnière dans la prise en compte du handicap.
Labellisés "Tourisme et Handicap", ces bateaux ont été spécifiquement pensés et construits avec tous les équipements permettant de les rendre accessibles à des personnes en fauteuils.
Passons en revue les divers aménagements opérés pour obtenir cette accessibilité :
- une plateforme mécanique ou électrique avant (+ arrière) d'embarquement et de débarquement,
- une table élévatrice pour accéder à la cabine et pour piloter,
- une salle d'eau et WC accessibles,
- un (ou deux) couchages accessibles en fauteuil.
Les 2 bateaux actuellement proposés à la location sont :
- 1 Triton 1060 Handy (2 cabines + le carré) pour 4 à 6 personnes dont 1 en fauteuil avec poste de pilotage adapté ; passerelle d'accès en fauteuil à l'arrière du bateau (treuil mécanique).
Au départ de Homps (11) pour naviguer sur le canal du Midi dans le Minervois.
Tel : 04.68.49.80.24

- 1 Espade 1230 Handy (2 cabines + le carré) pour 5 + 1 personnes dont 2 en fauteuil avec poste de pilotage adapté ; la cabine centrale comprend 2 couchettes simples avec potence, un matelas anti-escarres et deux positions de hauteur.
Au départ de Digoin (71) à l'intersection entre canal du Centre, du canal de Roanne et du Canal Latéral à la Loire.
Tél : 03 85 53 76 74
La péniche solaire « Soleil d'Oc » rebaptisée « Kevin »
Ce bateau écologique de tourisme fluvial sillonnait le Lot en commercialisant des croisières d'une semaine entre St-Sylvestre et Clairac (116 km de navigation A/R).
Sans bruit ni pollution, il offrait la particularité d'être accessible aux personnes handicapées.
L'originalité du concept « Naviratous », créé par Dominique Renouf (*), était de proposer un bateau qui fonctionne à l'énergie électrique fournie par des panneaux solaires sensés assurer une autonomie totale en été, et partielle le reste du temps.
Particularités
Il s'agit d'un catamaran fluvial en acier de 29,50 m sur 5 de large, qui peut accueillir 12 passagers.
Le pont principal, à hauteur des berges du Canal du Midi, autorise l'embarquement et le débarquement des passagers à mobilité réduites, sans dénivelé.
Il regroupait l'ensemble des services nécessaires à une croisière de plusieurs jours, avec des aménagements spécifiques : 4 douches, 1 WC et 6 cabines doubles adaptées : portes coulissantes, barres d'appui, aire de rotation pour les fauteuils, accessibilité des commandes (électricité, vasistas).
Revêtement des murs et parois muni de reliefs afin de permettre une meilleure orientation des personnes malvoyantes.
Tous les espaces sont accessibles de plain-pied.
Les séjours étaient vendus de 650 à 900 euros la semaine en pension complète et par personne selon les saisons, mais plusieurs formules étaient proposées :
- Week-ends,
- Minis-semaines,
- Semaines en pension complète ou demi-pension,
- Croisières repas à la journée.
Contact : Croisières pour Tous 06 88 40 76 21.
(*) Domique Renouf à publié en 2013 un ouvrage dans lequel elle retrace l'aventure de la réalisation du Soleil d'Oc (voir page bibliographie).
Nous publierons sur cette page toutes astuces pouvant améliorer la vie à bord de nos amis plaisanciers touchés par un handicap.
Forum
Bonjour, vous faites l'éloge du bateau solaire Kevin. Sur le principe, pas de problème, mais la réalité du Kevin aujoud'hui est qu'il a été interdit d'exploitation en 2017, pour équipements et entretien non aux normes, suite aux plaintes de plusieurs clients...
Cela a d'ailleurs été relaté par plusieurs articles dans la presse locale. La réalité est donc moins rose que vous ne la présentez !
D.T
Pour l'avoir rencontrée, tant sur le canal du Midi que sur le Lot, je n'ai vraiment pas de bons souvenirs de Mme. Renouf. Elle a pour habitude de tout vouloir régenter à sa façon, sans avoir la moindre courtoisie pour les autres usagers de la voie d'eau.
Elle use et abuse de la candeur et la générosité des personnes qu'elle entraîne dans ses projets et les traite souvent mal ; plusieurs jeunes "engagés" pour faire H24 le ménage et la cuisine à bord, sans jamais avoir été payés, ont fini par le quitter comme on se libère d'une secte !
J.P
Réponse :
En mars 2019, le Kevin a coulé sur le Lot à Casseneuil, son port d'attache habituel. Son manque d'entretien général n'y est sans doute pas étranger.
Dominique Renouf est un personnage très controversé, qui a été évincée de nombreux endroits notamment pour ne pas s'être acquittée des différents droits et factures qu'elle devait.
Mais elle est comme le Phénix qui grâce à son réseau et sa force de persuasion renaît toujours de ses cendres.
Son Kevin, maintenant renfloué est à vendre et elle s'est lancée dans une entreprise d'exploitation de coches électriques destinés à la location et à la vente, d'une taille beaucoup plus modeste.
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