Sans doute que la plupart des visiteurs de ce site connaissent ces sages conseils pour prévenir, neutraliser et recouvrir la rouille qui est un jour ou l'autre immanquablement le lot des bateaux acier...
Mais il faut bien commencer un jour, et les nouveaux navigateurs apprécieront sans doute de trouver ici quelques éléments pour restaurer ou entretenir les ponts, roofs, passavants, terrasse acier de leur bateau en acier...
Avertissement
Vous avez déjà peint de la ferraille (portail, chassis, voiture, vérandas...) et pensez maîtriser le sujet.
Prenez un grand bol d'humilité préalable, car les contraintes auxquelles sont soumis les aciers de votre bateau n'ont rien à voir et vous redevenez un débutant en la matière...
Tous ceux qui ont cru pouvoir appliquer techniques et produits courants pour la ferraille à leur bateau, ont été obligés de recommencer devant l'évidence : ce n'est pas pour rien que des produits spécifiques marines existent avec leurs caractéristiques et leur mode d'application propres...
Vous voilà prévenu !
Approche éconologique
La quasi majorité des produits efficaces de prévention et d'entretien des métaux pour les bateaux contiennent des composants chimiques ayant un impact important sur l'environnement.
Il vous appartient donc de bien les utiliser pour éviter le renouvellement de cette opération.
En cela, vous limiterez votre impact... sur la durée.
Bon à savoir
Qualité inox - Comment choisir entre A2 et A4 ?
L'INOX A2 (Aciers inoxydables Austénitiques de nuance 2, ou AISI 304 selon l’American Iron and Steel Institute).
Les aciers de nuance A2 sont les aciers inoxydables les plus répandus. Ils sont utilisés pour des équipements de cuisine, des appareils pour l’industrie chimique, des éléments de fixation … Les aciers de ce groupe ne conviennent pas pour les utilisations en acide non oxydant et comprenant des agents au chlore, et en eau de mer.
L'INOX A4 (Aciers inoxydables Austénitiques de nuance 4, ou AISI 316 selon l’American Iron and Steel Institute).
Les aciers de nuance A4, alliés en molybdène sont résistants à l’acide et donnent une meilleure résistance à la corrosion. L’A4 est beaucoup utilisé dans l’industrie car résistant à l’acide sulfurique et aux environnements chlorés. L’A4 est aussi habituellement utilisé par l’industrie alimentaire et la construction navale.
Présentation chimique des "inox 304 L" ou "316 L" ?
Voici les composition de ces deux alliages :
Inox AISI 304L (ou X2CrNi18-10) Carbone : 0,02 %, Chrome : 17 à 19 %, Nickel : 9 à 11 %
Inox AISI 316L (ou X2CrNiMo17-12) C : 0,02 %, Cr : 16 à 18 %, Ni : 11 à 13 %, Mo (Molybdène) : 2 %
La différence entre ces deux inox est principalement la présence de molybdène. Ce composant est présent pour améliorer la tenue dans les milieux corrosifs, comme les milieux marins, acides, phosphoriques ou bien soufrés.
Préparer les surfaces
Outre le sablage ou l'hydrogommage déjà décrits en détails sur ce site, le traitement local des surfaces rouillées se fait à la main (grattoirs, petit marteau, brosse métallique, papiers de verre adaptés...) ou avec de petits appareils électro portatifs de type meuleuse et ponceuse.
L'idée est de supprimer toute la partie pulvurélante de la rouille par abrasion, sans forcément attaquer l'épaisseur de la tôle, pour ne pas l'affaiblir.
Prendre la précaution de se protéger les yeux avec des lunettes, les mains avec des gants, et la figure avec un masque (au moins bouche/nez).
Neutraliser la rouille...
L'acide phosphorique
L'un des meilleurs neutralisateurs de rouille utilisés dans l'industrie est l'acide phosphorique, mais son usage demande certaines précautions et, tout le monde n'a pas accès à ce produit.
On en trouve en coopérative agricole à prix abordable, mais il est vendu le plus souvent en bidon de 20 litres....
Au litre, compter environ 21 €.
Sa mise en oeuvre se fait au pinceau (masque obligatoire et à l'air libre), et une fois sec (il fait changer de couleur la rouille) il convient de bien rincer et de bien essuyer.
Ensuite, un bon apprêt, une couche de résine si nécessaire et puis la peinture.
Voici aussi quelques préparations grand public spécifiques à cet usage :
du bon usage du "Rustol"
Ce super produit de couleur transparente formulé pour le traitement actif de la rouille, mis au point au pays des tulipes, a cependant des limites d'utilisation que chacun ne connaît pas forcément.
En effet, son usage en traitement de carène sous la ligne de flottaison n'est pas recommandé, même si une version spéciale (SIP), théoriquement adaptée, vous est proposée, le résultat ne sera pas au rendez-vous : reprise de rouille sous le bray ou l'antifouling.
Par contre, contrairement à ce que diffuse "radio-ponton" régulièrement, le "Rustol" basique est compatible avec tous les vernis, peintures, laques et lasures à liant gras (alkydes) séchant et restant à l’air, peintures à l’huile, peintures glycérophtaliques, uréthanes monocomposants, peintures à base d’asphalte pétrolier, enduits gras... sauf produits bi-composants.
Peut-être que les ratages - évoqués quelquefois - sont à mettre sur le compte d'une mauvaise préparation du support ou d'un séchage insuffisant (minimum 48 heures avant recouvrement).
Rappel
Tant que le Rustol n'est pas vraiment sec, il reste élastique. Si vous recouvrez un support mécaniquement souple par un produit (résine, peinture...) qui ne l'est pas (ou moins), il y aura forcément un feuilletage plus ou moins important avec risque d'infiltration d'humidité...
du bon usage du "Frameto"
De même, ce produit concurrent du précédent - mais de couleur noire - est prévu uniquement sur la partie émergée des bateaux (eaux mortes) ; en effet il n'est chimiquement pas compatible avec la majorité des peintures époxy de carène.
Une alternative : le "Ferose"
Emulsion aqueuse de résines synthétiques, le FEROSE pénètre rapidement à cœur la rouille ; en stoppant chimiquement l’oxydation et en polymérisant, il rend hermétique le métal dans son épaisseur pour supprimer la porosité, l’humidité et l’oxygène qui sont les agents constitutifs de la corrosion.
Le résultat, visualisé par le virage du produit du bleu au noir, est obtenu en à peine 10 minutes (à 20°C).
Usage
- Bien agiter le bidon avant emploi.
- Mettre directement sur la rouille, après avoir dégraissé soigneusement si nécessaire, et débarrassé de la rouille non adhérente et de la calamine.
- Appliquer très peu de FEROSE au pinceau, à la brosse, rouleau ou pistolet, en repassant plusieurs fois afin d'éviter les coulures.
- Laisser sécher 2 heures entre les couches.
- Appliquer entre 2 à 4 couches espacées de 2 heures minimum, jusqu’à quasi saturation, selon les endroits.
- Laver simplement les outils à l’eau claire.
Conseils
Pour ne pas souiller le contenu de votre bidon :
- ne pas tremper le pinceau directement dans le bidon ou son bouchon.
- ne pas reverser un éventuel surplus dans le bidon.
Intérêt pour la santé et la planète
- Ininflammable,
- Ne contient ni ACIDE CHLORHYDRIQUE ni ACIDE PHOSPHORIQUE,
- Non soumis à l’étiquetage de sécurité.
Rebouchage et mise à niveau
L'idéal est de ne pas chercher les économies de bout de chandelles en utilisant tout de suite le bon produit aux spécificités marines indiscutables.
Vous le paierez forcément plus cher que les "ersatz", mais vous n'aurez pas à y revenir grâce à ses propriétés stables tant chimiques que physiques.
Quel matériel utiliser ?
Comme il s'agit d'un mastic, toute spatule pourra être utilisée avec une préférence pour le couteau de peintre dans les parties peu accessibles ou délicates.
Conseil
Une fois que vous avez commencé avec une gamme (résine, sous-couche, laque) restez-y, pour être à peu près sûr que ces produits seront compatibles chimiquement...
Par exemple :
Vous serez tranquille en utilisant successivement :
- la résine bicomposant "Watertite",
- la sous-couche "PréKote",
- la laque "Toplac" de chez International.
La mise en peinture
Important !
La peinture doit être à la même température que le support, sinon vous aurez immanquablement une formation de condensation (point de rosée) sous la peinture, ce qui provoquera son décollement à la longue.
Sous-couche
La plupart du temps, les résines sont présentées comme étant directement prêtes à peindre.
Il est cependant fortement conseillé afin d’obtenir un excellent support d’accrochage pour tous types de peintures, résines et mastics (glycéro, acryliques, polyuréthanes, époxy, polyesters...) d'avoir recours à ce type de produit.
Finition
Viennent ensuite les couches de finition, en respectant à la lettre les recommandations du fournisseur : température, degré d'humidité, épaisseur des couches...
Quel matériel utiliser ?
Le petit rouleau - mais en matières végétales naturelles (coton) - fait merveille lorsque l'on sait s'en servir !
La plupart des produits se nettoient facilement au White Spirit ou avec le diluant spécifique associé aux produits d'une même gamme.
Les produits en phase aqueuse, les plus écologiques, se nettoient tout simplement à l'eau.
Conclusion
Un bateau bien protégé ne nécessite qu'un minimum d'entretien.
Par contre si cela n'a pas été réalisé selon les règles de l'art, les couches de peintures successives n'empêcheront pas la rouille de réapparaître.
Ayez toujours à l'esprit qu'il est bien moins coûteux (et même écologique) de faire les choses correctement que d'être obligé de tout refaire régulièrement ou d'avoir un bateau qui se dégrade rapidement.
Prévenir la rouille, vaut mieux que traiter la rouille
Voici quelques précautions utiles pour protéger de la rouille un bateau en acier lors de sa construction.
Quelques explications préliminaires
Les tôles ou profilés qui constituent nos bateaux sont recouvert d'une calamine (FeO) trés dure lorsqu'ils sortent du laminoir qui calibre leur épaisseur ; or c'est justement sous la calamine que s'installe la rouille ; ainsi tout traitement ou peinture ne sera d'aucune utilité tant que la calamine fera écran entre la tôle et ce revêtement.
Comment enlever la calamine :
- la méthode chimique
la tôle est plongée dans un bain d'acide (chlorydrique, le plus souvent), rincée, puis peinte ; cela donne des tôles dites prépeintes (carbozinc ou newplat).
L'idéal étant d'utiliser des bains contenant des neutralisants afin d’éliminer ou de limiter l’attaque du métal grâce à un inhibiteur de corrosion, pour enlever la calamine sans affaiblir le métal.
- la méthode mécanique
par sablage, le plus souvent après façonnage et soudage ; mais ce dernier n'est pas facile à mettre un oeuvre correctement une fois le bateau assemblé.
Pour des raisons à la fois pratiques et économiques, les chantiers navals commandent des tôles prépeintes pour éviter le sablage intérieur des bateaux.
Dans les chantiers sérieux on veille - théoriquement - lors de la construction du bateau, à laisser un accés à tous les recoins pour pouvoir correctement souder, nettoyer, sabler, et finalement peindre.
On anticipe même l'écoulement de l'eau (notamment par condensation) en créant des "anguillers" dans les lisses, dans les varangues, carlingues... et l'on prend même la peine de ventiler les endroits fermés (coqueron, fonds, puits de chaînes...).
Mais lors de l'assemblage par soudage des tôles ou prolilés, leurs champs sont taillés, ajustés et meulés, ce qui a pour conséquence de casser la peinture protectrice des tôles.
Pour éviter que la rouille s'installe entre l'épaisseur des profilés et le bordé, par exemple, on effectue des soudures continues 2 faces.
Il faut donc préalablement sabler légèrement les soudures et les griffures sur la couche de protection des tôles avant leur mise en peinture.
Autre méthode utilisée par certains chantiers, le chouppage (*) des oeuvres mortes extérieures, c'est très efficace lorsque c'est bien réalisé (voir notre dossier sur ce site).
(*) le chouppage peut s'exécuter à chaud ou à froid.
Sous-couche de protection
Pour protéger durablement la tôle, les chantiers badigonnent le tout avec 3 ou 4 couches de peinture antirouille de couleur différente pour mieux visualiser la qualité du travail réalisé.
Le piège du pont en teck
Quoi de plus sympa et "marin" qu'un pont en teck ?
De nombreux trawlers ou vedettes en acier ont leur ponts et passavants recouverts de ce bois exotique aux qualités marines indéniables en terme de résistance à l'eau et au sel, notamment.
Sauf que, sur un bateau acier, ce n'est vraiment pas adapté à long terme et devient même source de dégradations.
En effet, que le teck soit collé directement sur la tôle ou sur une sous-couche de contreplaqué marine, la photo ci-contre visualise le résultat au bout "d'un certain temps".
Que se passe-t-il ?
La tôle des ponts s'échauffe et se dilate sous l'action de la chaleur et de façon non homogène (en température et étirement) par rapport au bois.
Cela crée à la fois un décollement partiel et des points de rosée.
Une fois cette étape franchie, c'est la pire des situation : l'humidité est prise en sandwich entre la tôle et le bois, sans possibilité d'être asséchée (avec un risque de gel en hiver qui va encore accentuer les dégâts).
Ensuite, c'est la rouille qui va exercer son action finissant même par percer les tôles les plus épaisses...
Et qui a le courage de démancher son pont en teck pour vérifier l'état de corrosion du support ?
Dans les faits, personne.
La plupart du temps, lorsqu'on a des doutes, c'est déjà trop tard !
Remplacer des parties de tôle sur un pont ou des passavants n'est pas une opération anodine !
Alors, propriétaires ou futurs acquéreurs de bateaux acier, soyez vigilants...
Les vaigrages
Dans les constructions navales soignées, les vaigrages sont en vinyle, collé sur un support mousse, lui-même collé sur une couche de bois, elle-même collée sur la tole des oeuvres mortes.
Après de nombreuses années d'utilisation, il se peut qu'il faille les rafraîchir, pour leur rendre leur lustre d'origine.
Mais alors quel type de peinture utiliser, car elle doit être à la fois compatible avec le support vinyle et rester souple !
Il existe certes des produits spécifiques plus généralement utilisés pour les selleries (des voitures, par exemple), mais leur prix, ramené au litre, vaut une petite fortune et, généralement, ils sont vendus en petits conditionnements, peu compatibles avec les surfaces à repeindre sur un bateau.
Il existe égalenent des peintures en conditionnements mieux adaptés (de 1 à 5 litres) plus spécifiquement dédiés à l'entretien des façades déjà protégées avec une peinture vinyle.
A l'usage, elles ne tiennent pas en usage nautique, compte tenu des contraintes liées aux vaigrages de nos bateaux.
Après plusieurs essais, la moins mauvaise des solutions que nous avons testées reste la peinture "Toplac" de la gamme International.
Bien entendu, avant application, il convient de dégraisser le vaigrage puis de le poncer légèrement au papier fin.
Forum
Comme d'habitude, votre dossier est béton : complet et didactique ; bravo.
Juste une question : une fois la rouille traitée au Rustol, puis-je mettre de la résine époxy directement dessus ?
B.L
Réponse
Si vous avez bien lu l'étiquette, il n'est pas recommandé de couvrir le rustol avec des produits bi-composants. Comme c'est le cas de la résine epoxy, il est plus judicieux de le recouvrir avec un apprêt de sous-couche, puis de votre résine.
Merci infiniment pour tous ces bons conseils. Aujourd'hui, je comprends mieux l'importance du choix des bons produits et de leurs modes d'application ! Comme vous le soulignez justement, l'entretien d'un bateau en acier n'a rien à voir avec celui d'un portail ou d'une balustrade de maison.
J.L
J'ai effectué plusieurs croisières sur des paquebots et j'ai eu l'occasion d'assister à l'entretien des peintures sur les parties ferreuses du navire. Ils utilisent en effet des peintures spéciales marine de l'une des grandes marques que vous évoquez.
Cela a fini de me convaincre de ne plus utiliser n'importe quoi, en pensant faire des économies.
M.V
Merci pour toutes ces magnifiques informations qui nous aident à garder en bonne forme nos chers bateaux.
Votre bon plan pour repeindre les vaigrages est valable, puisque je l'ai utilisé (2 couches) et cela tient bien depuis plusieurs années maintenant.
C.H
Autres liens connexes
- Astuces techniques
- Entretien des moteurs
- Protection des coques
- Chouppage à froid |