Equivalent du camping sauvage, le mouillage à proximité des côtes est une immersion dans la nature très appréciée des plaisanciers.
Sauf lorsque les zones de mouillage sont tellement encombrées qu'on se croirait sur une plage en plein mois d'août.
Comment mouiller respectueusement, vis à vis des autres usagers et sans abîmer fond et ressources ?
Généralités
À chaque manoeuvre de mouillage, l’ancre traîne, puis “croche”.
La chaîne, sous l’effet de la houle et du vent, “rague” et balaye le fond sur tout le secteur d’évitage du bateau.
Ensuite, lors de l’appareillage du navire, l’ancre laboure à nouveau le fond.
Les ravages causés sur toute forme de vie fixée – animale ou végétale – sont donc importants et particulièrement dramatiques sur l’herbier de posidonies.
D’autre part, la probabilité d’apparition de Caulerpa taxifolia par colportage accidentel est directement liée au nombre et à la fréquence des mouillages.
Bien choisir son câblot
Quelques fondamentaux à connaître avant d’acheter votre cablot suivant la taille de votre bateau :
- 5 à 6,50 m : cordage de 10 mm et chaîne de 6 mm,
- 6,50 à 9 m : cordage de 14 mm et chaîne de 8 mm,
- 9 à 12 m : cordage de 18 mm et chaîne de 10 mm.
Votre câblot peut être en polyester ou en polyamide.
Le premier est plus souple, un peu plus cher, mais moins résistant que le second.
Bonne pratique du mouillage
Le mouillage forain impose de respecter quelques fondamentaux :
- se renseigner sur les zones de mouillage
Sauf en cas d'urgence, on ne doit pas mouiller n'importe où...
Sur certaines zones, le mouillage est interdit (fond protégé, câble sous-marin...)
Les cartes indiquent la nature des fonds, ce qui peut être précieux pour préparer son mouillage sur des zones inconnues ou peu fréquentées (voir application Navily, en bas de page).
Par exemple un ancrage dans le sens de la pente (bateau en bas) est peu sûr alors que le contraire est parfait.
- se mettre à l'abri des vagues et des vents dominants
A choisir, optez plutôt pour le vent que pour les vagues car ces dernières déplacent le bateau en exerçant une tension importante sur la ligne de mouillage, avec des risques de rupture.
Si le mouillage est pour la nuit, anticiper le vent de mer pour vous positionner (par beau temps le vent thermique va vous faire tourner et il faut donc pouvoir éviter sur 360°).
Attention également aux effets venturi lorsque le vent s’engouffre dans les failles des reliefs côtiers.
- Toujours manoeuvrer face au vent
L'idéal est de reculer doucement pour dérouler la chaîne sur le fond et faire crocher l'ancre.
- Confort à bord = ni tangage, ni roulis.
- Les fonds de sable et de vase dure sont à privilégier.
- Eviter les herbiers
Pour ne pas labourer les fonds (par respect environnemental).
Mais également car ce sont des fonds de mauvaise tenue, dans lesquels l'ancre ne s'enfonce pas correctement.
- Eviter les zones rocheuses
Où l'ancre ne pourrait s'enfouir et où elle risque de rester coincée.
- Longueur syndicale
Les manuels de navigation préconisent une longueur de 3 à 5 fois la hauteur totale (profondeur + hauteur marée + hauteur au davier).
D'autres parlent en longueur de bateau...
Peu importe, si vous respectez de ne pas dépasser un angle de 30° et que vous gardez en mémoire que c'est plus la chaine que l'ancre qui fait la solidité du mouillage.
- Mouiller court sur fond de vase dure
Deux fois la longueur du bateau suffit, et il est recommandé de fixer l'ancre au moteur, puis de lâcher une longueur de mouillage normale.
Se méfier des vases molles ou visqueuses qui ne permettent pas une accroche solide.
- dans le cas d'un mouillage entre deux bateaux
se positionner dans les trois quart de leur arrière et mouiller long, en surveillant que le bateau puisse faire un 360° sans rencontrer d’obstacle, ce qui est impératif en mouillage de nuit.
- frapper son ancre ?
Le guindeau n'est pas réellement adapté à une traction horizontale.
Il vaut souvent mieux accrocher la ligne à une "main de fer" (sorte de crochet que l'on passe sur les maillons et équipé d'un bout que l'on fixe à un taquet avant).
- Oringuer ou pas ?
En fond rocheux, c'est plutôt conseillé, car le risque de ne pouvoir remonter l'ancre existe, et l'orin permet de mieux s'en sortir.
- Faut-il utiliser une ancre de miséricorde ?
On appelle ainsi une ancre secondaire, la plupart du temps utilisée avec un bon câblot pour maintenir le bateau, soit par l'arrière, soit par les bords.
Dans certains cas, cela peut amener un confort supplémentaire au mouillage en le maintenant sur l'axe choisi (ce qui ne reste souhaitable que par petit temps).
- Remontée du mouillage
Ne pas le faire au guindeau en tractant le bateau sur son ancre.
Dans l'idéal, avancer au moteur (complété par le propulseur d'étrave, le cas échéant) pour amener le davier au dessus du point d'accroche, et à ce moment seulement actionner le guindeau ; non seulement vous ne labourerez pas le fond, mais en plus vous épargnerez votre guindeau et votre barbotin !
Astuce
Une fois mouillé, Suivant la nature du fond (rochers, câbles de mouillage...) quelle garantie avez-vous de récupérer votre ancre au moment de repartir ?
L'installation d'un orin (cordage fixé au diamant de l'ancre et maintenu en surface par une bouée), vous avez la possibilité de remonter votre ancre bloquée au fond ; elle va permettre son basculement, puis sa libération, sans avoir à plonger.
De plus, l'orin situé à la verticale de l'ancre permet de la signaler aux autres bateaux ainsi que la zone d'évitage à préserver.
Par contre, l'usage d'un orin à longueur fixe pose des problèmes, puisque les fonds ne sont pas toujours à la même profondeur.
La solution est relativement simple en s'équipant d'une bouée à enrouleur interne (type Swi-Tec) qui reste stationnaire au-dessus de l'ancre tiut en suivant les variations de hauteur d'eau ; la qualité de construction avec un mécanisme tout en inox assure son bon fonctionnement dans le temps.
La boule de mouillage
Certaines embarcations (gros bateaux, généralement) abordent une boule noire établie en hauteur quand ils sont au mouillage.
La boule de mouillage indique que le bateau est à l'arrêt, non manœuvrant et sans personne à la veille.
Mais les plaisanciers sont peu nombreux à se plier à cette réglementation.
Depuis la mise en place de la Division 240 (2008) qui fixe les règles de sécurité applicables à la navigation de plaisance en mer sur des embarcations de longueur inférieure ou égale a 24 m, cette boule de mouillage ne fait plus partie de l'armement obligatoire à avoir à bord.
Alors, qu'en est-il ?
Le Ripam dit :
L'article 240-2.09 relatif au Règlement International pour Prévenir les Abordages en Mer (RIPAM) dispose que "Les navires de plaisance sont astreints au respect des dispositions rendues applicables, selon les caractéristiques du navire, par le décret 77-733 du 6 juillet 1977 portant publication de la convention sur le règlement international de 1972 pour prévenir les abordages en mer, faite à Londres le 20 octobre 1972."
En résumé, les navires, même ceux de plaisance doivent se plier à ce règlement.
Donc, si les caractéristiques du navire le soumettent selon le RIPAM l'emport d'une boule de mouillage, elle doit se trouver à bord en application de l'article 240-2.09.
Dans les faits, selon le RIPAM (règle n°30) :
- un navire de longueur inférieure à 50 mètres doit montrer, à l'endroit le plus visible, un feu blanc visible sur tout l'horizon ou une boule.
- un navire de longueur inférieure à 7 mètres, n'est pas tenu de montrer les feux ou la marque (boule), sauf s'il est au mouillage dans un chenal étroit, une voie d'accès ou un ancrage, à proximité´ de ces lieux, ou sur les routes habituellement fréquentées par d'autres navires.
Mouiller éco-responsable ?
Que ce soit pour passer plusieurs nuits au mouillage où se mettre à l’abri du mauvais temps, comment mouiller de façon éco-responsable ; quelques pistes :
Choisir de préférence une zone de sable pour ancrer
Celle-ci est facilement repérable depuis la surface, par sa couleur claire.
Ensuite, l’utilisation d’un orin évite le raclement du fond.
Cette petite bouée, fixée à l’ancre par un bout, permet de tirer l’ancre verticalement et ainsi de minimiser l’impact en la remontant ; elle permet en outre de visualiser sa position sur l’eau.
Les ancres écologiques
Il existe sur le marché des ancres dites "écologiques" pour la plaisance, moins agressives pour les fonds.
Rincer votre ligne de mouillage
Avant de la ranger dans la baille, rincer votre ligne de mouillage ; déjà cela lui fera du bien, mais surtout, vous ne risquerez pas de disséminer sur votre prochain lieu de mouillage des algues locales.
Autres conseils
Si vous remontez des Caulerpa avec votre ancre :
- récupérez-les et jetez-les dans une poubelle à terre (ne les remettez pas à l'eau) ;
Si en trouvez lors de vos balades :
- localisez-les et prévenez le "Laboratoire environnement littoral" de l’Université de Nice Sophia Antipolis, Centre de l’Observatoire sur l’expansion de Caulerpa taxifolia en Méditerranée.
Tél : 04 92 07 68 46
Site : www.caulerpa.org
Mais si la façon de mouiller en zone naturelle (mouillage forain) par le plaisancier est importante, il relève de la responsabilité des organismes gérant les littoraux et offrant (faisant payer une fortune, maintenant !) des zones équipées de points de mouillage, de le faire dans le respect maximum des fonds...
Les corps-morts
La formule du mouillage organisé sur "corps-mort balisé", en vue de réduire l’impact néfaste des ancrages individuels, très courant dans les baies méditerranéennes, n’est pourtant pas totalement satisfaisante. En effet, la surface occupée de façon permanente sur le fond, associée au balayage répété de la chaîne sur la zone périphérique du corps-mort, « stérilise » une surface importante du fond.
Pour le corps-mort, l’impact est parfaitement localisé et permanent, alors qu’il est plus diffus et renouvelé dans le cas du mouillage individuel.
Mais l’agression vis-à-vis du sol existe dans les deux cas, et il faudrait développer de nouvelles solutions techniques permettant de concilier développement des activités nautiques et protection du milieu.
Les alternatives
Les ancres à vis
Ce dispositif au-dessus duquel est placé un système capable de tenir une tonne est une solution intéressante :
– ancrage simple, résistant et fiable,
– impact environnemental négligeable (la surface occupée sur le fond est très faible),
– aucun contact de la ligne de mouillage sur le fond,
– un point d’ancrage qui affleure le sol et ne constitue aucun obstacle pour les engins de pêche,
- une parfaite adaptation à divers substrats : éboulis, sable divers, vase, matte morte et matte vivante de posidonies,
- facilité de mise en place et d’enlèvement (favorise les zones de jachère).
Dimensionnement de la ligne d'ancre
Pour ne pas avoir de mauvaises surprises, il est nécessaire de respecter un certain nombre de règles, en particulier concernant le dimensionnement du matériel en fonction de la taille et du poids du bateau.
Voici le tableau des caractéristiques des apparaux de mouillage : (source Réglementation Française)
Longueur du bateau |
Poids du bateau |
Masse ancre * |
Ø chaîne ** |
Ø câblot *** |
< 6.50 m |
< 1 000 kg |
8 kg |
6 mm |
10 mm |
6,50 m à 7,50 m |
1 000 kg à 2 000 kg |
10 kg |
8 mm |
14 mm |
7,50 m à 9,00 m |
2 000 kg à 3 000 kg |
12 kg |
8 mm |
14 mm |
9,00 m à 10,00 m |
3 000 kg à 4 500 kg |
14 kg |
8 mm |
14 mm |
10,00 m à 12,50 m |
4 500 kg à 8 000 kg |
16 kg |
10 mm |
18 mm |
12,50 m à 16,00 m |
8 000 kg à 12 000 kg |
20 kg |
10 mm |
18 mm |
16,00 m à 18,00 m |
12 000 kg à 16 000 kg |
24 kg |
12 mm |
22 mm |
18,00 m à 20,00 m |
16 000 kg à 20 000 kg |
34 kg |
12 mm |
22 mm |
20,00 m à 25,00 m |
20 000 kg à 30 000 kg |
40 kg |
14 mm |
24 mm |
> 25,00 m |
> 30 000 kg |
60 kg |
16 mm |
28 mm |
* La masse des ancres ci-dessus est définie pour des ancres à grande pénétration avec une tolérance de + ou - 10 pour 1000. Elle doit être majorée d'un tiers pour les ancres à jas et les ancres à bascule à massif arrière. Le matériau constitutif des ancres doit être l'acier, d'une résistance à la traction supérieure à 40 DaN/mm² ou tout autre matériau offrant des garanties équivalentes. Les ancres à organeau coulissant ne sont pas autorisées pour l'armement réglementaire des navires.
** Les chaînes doivent être conformes aux caractéristiques de la chaîne galvanisée de la norme Afnor en vigueur ou d'une résistance à la traction équivalente.
*** Le câblot doit être en fibre polyamide trois torons ou en tout autre matériau offrant des caractéristiques équivalentes.
La posidonie
Typique de la Méditerranée, la posidonie est une des rares plantes à fleurs (et non une algue), à pouvoir vivre en eau de mer. Elle possède des feuilles rubanées de 20 à 80 cm de long selon les saisons et d’un centimètre de large environ.
Ses feuilles sont organisées en faisceaux eux-mêmes attachés à des tiges rampantes ou dressées (les rhizomes).
La posidonie rejette de 14 à 20 litres d’oxygène par jour et par mètre carré, ce qui en fait un acteur indispensable de la vie marine. La plante pousse de 1 à 5 centimètres par an de deux façons :
- horizontalement d’abord, elle va occuper un maximum de terrain.
- verticalement ensuite, le bouquet de feuilles piège des sédiments et ainsi permet de reconstituer le sol. L’élévation successive du fond donne une « matte » dont la partie haute est vivante et qui peut atteindre plusieurs mètres de haut. Tout au cours de l’année, les posidonies perdent leurs vieilles feuilles brunies ; la perte est toutefois plus importante et visible en automne, après les premières tempêtes. Les herbiers de posidonies vivent dans la bande littorale, jusqu’à 40 mètres de profondeur maximum.
Mouillage "méditerranéen" ou mouillage "cul à quai avec ancrage "
Ce type d'amarrage est un hybride entre le mouillage sur ancre et l'amarrage "cul à quai".
Il n'est utilisable que dans les zones sans marnage d'où son nom de "Mouillage méditerranéen".
Dans l'amarrage classique "culs à quai", l'étrave est maintenue par une pendille ; mais lorsque le port n'est pas équipé de pendilles c'est votre mouillage qui maintient l'étrave du bateau en place.
Dans la pratique, il s'agit de jeter l'ancre au milieu du port, puis de culer jusqu'au quai (ou catway) et de s'y amarrer.
Pour le réussir, il faut observer les phases suivantes :
- préparer l'embarcation (vérification de l'ancre ainsi que du guindeau, positionnement des pare-battages et des aussières à la poupe) et sur les bordés, si vous avez des voisins),
- faire un premier tour pour repèrer sa place, et les effets de vents ou de courants éventuels,
- lors d'un deuxième tour, jeter l'ancre suffisamment à l'avant de cette place,
- reculer lentement en corrigeant sa trajectoire (utiliser l'effet de pas d'hélice),
- amarrer par l'arrière.
A savoir :
Lorsqu'on va enclencher la marche arrière, la poupe partira à bâbord ou à tribord selon le pas de l'hélice (et la proue à l'opposé).
Il faut se servir de cet effet pour stabiliser ou maîtriser la trajectoire.
Mouillage par houle transversale
Voici un dispositif que les adeptes du mouillage en mer connaissent bien.
Par vent (souvent faible) plaçant votre bateau parallèlement aux vagues (ou petite houle), apparaît un roulis qui devient vite très inconfortable !
Voici comment atténuer considérablement ce roulis.
L'idée repose sur un positionnement de l'étrave du bateau face aux vagues, en s'appuyant sur le vent pour transformer le roulis en tangage, ce qui est un moindre mal (de mer)...
Navily, une application pour bien choisir son mouillage
Navily est une application de type communautaire créée par deux amis plaisanciers Edouard et Benjamin, suite à plusieurs mauvaises expériences de mouillage.
Elle est gratuite et disponible sur "Ios" et "Androïd", en anglais, français et italien.
Principe
Les utilisateurs partagent sur la carte de Navily leurs évaluations de mouillage, bonnes ou mauvaises (géolocalisation, photo, type de fond, profondeur, protection contre le vent et la houle et commentaires...)
Ces informations sont publiées en temps réel et vérifiées par des modérateurs.
En plus des ports, les créateurs ont ajouté les mouillages organisés afin de couvrir l’ensemble des types d’escales recherchées par les plaisanciers.
Zone
Pour l'instant, seule la Méditerranée est ainsi cartographiée et référencée, mais nul doute que ce service sera étendu aux autres zones de navigation, françaises, puis internationales.
Site
Navily.com
Forum
Très bon votre article tant sur le fond que sur la forme.
Par contre j'ajouterai l'intérêt de mettre des ressorts de mouillage. Cela permet d'amortir efficacement les coups de vent et de dissiper l’énorme énergie cinétique supportée.
Bonne continuation et bon vent.
F.F
Nickel votre dossier, et merci pour l'info sur l'appli Navily, cela va rendre bien des services à tous ceux d'entre nous qui mouillent régulièrement au petit bonheur.
Jacky.
A propos de votre bouée porte-orin pour l'ancre, voici un truc qui permet de se passer d'en acheter une : le cordage de l'orin (plus long de quelques mètres) est lesté d'un plomb de plongeur et passe dans une poulie sous une simple bouée, ou même un pare-battage... le réglage est automatique, gratuit et tout aussi inoxydable...
V.P
Autres liens connexes
Vents et météo marine |