Les pollutions engendrées par le fioul lourd utilisé massivement dans le transport maritime sont très largement plus dangereuses pour la santé que celles du transport automobile ! Et pourtant...
Le fioul lourd
Les navires marchands, cargos et bateaux de croisière utilisent essentiellement comme carburant le "fioul lourd", un sous-produit du pétrole, dont la combustion aboutit à énormément de particules fines, d'oxydes d’azotes, et surtout une grande quantité d'oxydes de soufre.
En effet, ce fioul lourd a une teneur en soufre plus de 3 000 fois supérieure à celle des carburants utilisés par les voitures et les camions.
Pour donner un ordre d'idée, un seul cargo pollue autant que 50.000 véhicules terrestres !
Ce fioul lourd est non seulement l’un des principaux facteurs à l’origine du problème d’acidification des pluies mais il est également un produit très toxique pour la santé humaine.
Impact sur la santé
Dans une étude récente (juin 2015), l’université de Rostock et le centre de recherche sur l’environnement allemand "Helmholtz Zentrum Munich" ont établis un lien sans équivoque entre les gaz d’échappement des cargos et des maladies graves tant pulmonaires que cardiovasculaires.
Ce sont logiquement les habitants des régions côtières qui courent un risque augmenté de 50 %, mais les vents du large emporte cette pollution sur des centaines de kilomètres à l'intérieur des terres !
Des données provenant des services de surveillance de la santé publique de Long Beach dans le district de Los Angeles (USA) révèlent que les populations vivant à proximité de l’enclave portuaire connaissent des niveaux d’asthme, de maladies cardiovasculaires et de dépression supérieurs de 3 % en moyenne à ceux des autres habitants de la ville.
C'est ainsi que les émissions du transport maritime, selon cette étude, provoquent 60 000 décès prématurés par an dans l’Union européenne avec un coût pour les services de santé européens de 58 milliards d’euros.
Un combustible non taxé !
Le transport routier paie des taxes sur les carburants et des mesures ont été prises pour réduire les polluants issus du diesel utilisé par les voitures et camions.
Les carburants maritimes, bien plus toxiques restent étonnamment peu réglementés, et mieux encore, . ils ne sont pas taxés !
Pourquoi ?
Le lobbying des armateurs est encore largement plus puissant que toutes les instances sanitaires et environnementales tant nationales qu'européennes et mêmes mondiales.
Pourtant, si le carburant des cargos était taxé, cela freinerait les délocalisations mangeuses d'emploi en renchérissant le coût du transport des produits fabriqués loin de leur zone de consommation.
Une règlementation timide
"On ne touche pas au transport maritime" semble être la règle...
En effet, la réglementation dans ce secteur est essentiellement internationale.
C'est la convention Marpol (pollution marine) établie par l’Organisation maritime internationale qui a récemment mis en place des zones d’émissions contrôlées dans lesquelles les teneurs en soufre des carburants sont sensées être réglementées (Sulphur Emissions Control Areas, SECAs).
Ainsi, depuis le 1er janvier 2016, en Manche, dans la mer Baltique et la mer du Nord, comme dans presque toutes les zones côtières américaines et canadiennes, les navires ne peuvent plus utiliser de carburant contenant plus de 0,1 % de soufre.
Par contre, en Méditerranée, où les taux peuvent s’élever jusqu’à 4 %, ce seuil ne s’appliquera qu’à partir de 2020 ou 2025... Pourquoi ?
Un manque de volonté des Etats participant à la convention Marpol, et notamment de la France, toujours plus prompte à donner des leçons plutôt qu'à les appliquer.
Le 29 avril, l’Hexagone s’est d’ailleurs vu adresser par la Commission européenne une mise en demeure pour retard dans la transposition de la directive « soufre » réglementant les émissions dégagées par les navires. Déclinaison de la convention Marpol, cette directive, adoptée en octobre 2012, impose aux Etats membres de faire respecter les seuils limites prévus dans les SECAs. Sa transposition devait être achevée le 18 juin 2014.
Le 29 avril 2015 d'ailleurs, la France s’est vu adresser par la Commission européenne une mise en demeure pour retard dans la transposition de la directive « soufre » réglementant les émissions dégagées par les navires (déclinaison de la convention Marpol, une directive pourtant adoptée en octobre 2012 qui impose aux Etats membres de faire respecter les seuils limites prévus dans les SECAs ; sa transposition devait être achevée le 18 juin 2014.
La COP21, c'est pour les autres !
Quelques petits pas...
- Dans certains ports, les bateaux de croisière et les cargos sont tenus d'utiliser du fioul raffiné pour les manoeuvres d'entrée et de sortie.
- Dans les ports de Seattle ou de Houston par exemple, une compensation est versée aux armateurs pour le surcoût qu’entraîne le changement de carburant.
- Le port de Singapour module ses taxes portuaires en fonction du type de carburant utilisé par les navires.
C'est déjà un petit progrés, mais cela reste insuffisant.
Les pistes techniques à suivre
Elles sont de 3 ordres en restant sur un usage de fioul comme carburant :
- limiter les émissions de soufre émises par les cargos en filtrant leur gaz d’échappement,
- utiliser un fioul plus raffiné, identique à celui de nos véhicules terrestres.
- branchement des navires en escale sur le réseau électrique terrestre, pour arrêter les moteurs des génératrices, tout en maintenant les services nécessaires à bord...
Mais ensuite, il serait temps de se pencher sur les alternatives déjà expérimentées pour la marine marchande : moteurs à gaz naturel liquéfié (GPL), cargos hybrides à voile...
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